André Bandelier (1940 – 2021, Peseux, Suisse)

Études : Mon cheminement reste inséparable de ces écoles du peuple qu’étaient les écoles normales d’instituteurs : j’ai obtenu en 1960 un brevet pour l’enseignement dans les écoles primaires du canton de Berne avec une douzaine de condisciples, issus à parts égales des mondes ouvrier et agricole. Un tel « viatique » n’offrait qu’une occasion de promotion : la possibilité d’accéder au secondaire inférieur, moyennant de courtes études universitaires (brevet d’enseignement secondaire bernois 1965). La reconnaissance de ces formations de base par l’Université de Neuchâtel m’a permis d’achever des études en langue et littérature françaises, en histoire et en géographie-ethnologie : j’y ai obtenu la licence en 1968 et le doctorat ès lettres en 1980, sans jamais interrompre des pratiques enseignantes diverses.

Vie professionnelle et carrière académique : Parcours d’un enseignant généraliste qui a commencé par faire du français langue seconde sans le savoir ! Installé sur le flanc du Massif jurassien dans une classe à plusieurs degrés, j’ai timidement appliqué les principes de l’école active (j’avais rencontré brièvement Célestin Freinet en 1959) et enseigné le français langue maternelle (FLM), sans discernement, à un public mi-parti, élèves francophones et germanophones de 10 à 15 ans. Je dois à des historiens, à des critiques littéraires et à des linguistes qui souhaitaient sans doute m’offrir la possibilité de poursuivre mes recherches (dans des voies difficilement conciliables), d’avoir été intégré tôt au corps enseignant universitaire. Je le fus à des fonctions modestes, qui ne constituèrent jamais des sinécures : cours de vacances de l’Université de Neuchâtel dès 1968, avec la découverte des méthodes audiovisuelles (Voix et images de France, De vive voix, La France en direct) ; bref lectorat en linguistique appliquée (j’ai failli me perdre dans les tests de langue objectifs) ; engagement au Séminaire de français moderne dès 1970, institution maintenant plus que centenaire, que j’abandonnerai tout de même en 2003 ; expériences isolées mais marquantes, telles ces charges exercées à l’Université de Limoges (maître de conférences associé en histoire moderne 1989-1990, professeur invité en troisième cycle d’histoire 2001) ou au Bureau des Services de Pékin pour les Missions Diplomatiques (ouverture de la section de français au Centre de formation pour interprètes 1989).

Les matières enseignées : Elles correspondent aux besoins d’une institution qui a gardé sa tradition littéraire et scripturaire (cf. Philippe Terrier, « 100 ans d’enseignement du français langue étrangère à l’Université de Neuchâtel (1892-1992) », dans Documents SIHFLES, no 20, décembre 1997, 127-140). La base consiste en des cours de langue de niveau moyen et avancé. Les spécialisations littéraires (explication de textes, littérature de Suisse romande, histoire sociale et littérature) se sont effacées devant un engagement plus marqué pour des cours de civilisation tirant profit de mes recherches historiques (histoire sociale de la société française des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles, civilisation française et européenne). Et c’est à celui qui était bardé de diplômes pédagogiques qu’on a offert également les heures de didactique du français langue étrangère (FLE), où se côtoient les étudiants de notre Diplôme pour l’enseignement du français en pays de langue étrangère et les stagiaires francophones du Séminaire pédagogique de l’enseignement secondaire neuchâtelois. Ceux-ci, à côté de leur spécialisation en FLM, choisissent volontairement ce complément FLE pour se préparer à la multiculturalité locale : dans la seule ville de Neuchâtel (32’000 habitants), durant l’année scolaire 1999-2000, les 1577 élèves du niveau primaire se répartissaient entre 57 pays reconnus et 4 régions revendiquant leur indépendance (étrangers : 618, soit 40,5 %, selon la statistique du Service des écoles), reflet des besoins futurs au niveau secondaire.

Domaines de recherche : Ils oscillent, en un équilibre précaire, entre une aspiration forte à comprendre le présent à travers l’histoire sociale et culturelle, et les compléments exigés par un enseignement académique du FLE. Je dirige actuellement un projet transdisciplinaire subsidié par le Fonds national suisse de la recherche scientifique, intitulé « Étude d’un réseau de relations savant au XVIIIe siècle : à l’exemple des correspondants suisses du secrétaire perpétuel de l’Académie de Berlin » (« Sur la correspondance de Jean-Henri-Samuel Formey », dans Penser par lettre, Actes du colloque d’Azay-le-Ferron (mai 1997), Montréal, Fides, 1998, 205-217). Je renoue ainsi avec le préceptorat du XVIIIe siècle.

Les travaux scientifiques les plus représentatifs, qui reflètent la diversité des intérêts, ont été marqués par des expériences collectives enrichissantes :

1. L’Evêché de Bâle et le Pays de Montbéliard à l’époque napoléonienne: Porrentruy, sous-préfecture du Haut-Rhin. Un arrondissement communal sous le Consulat et l’Empire, 1800-1814, Neuchâtel, La Baconnière, 1980, XVI+624 p., thèse de doctorat.

2. Table de concordances rythmique et syntaxique des Poésies d’Arthur Rimbaud, Neuchâtel, La Baconnière, 1981, 2 vol. (en collaboration).

3. Nouvelle Histoire du Jura, Porrentruy, Société jurassienne d’Emulation, 1984, 304 p. (en collaboration).

4. Théophile-Rémy Frêne, Journal de ma vie, Porrentruy, Société jurassienne d’Emulation, et Bienne, Ed. Intervalles, 1993-1994, 5 vol., édition critique d’un journal personnel du XVIIIe s. (en collaboration).

La SIHFLES ?

L’aubaine de la fin du deuxième millénaire… Cette association m’a permis de conjuguer intérêts pédagogiques et passion d’historien de manière naturelle.

Les travaux les plus directement proches de son activité sont les suivants :

1. « De la psychologie du comportement à la sociolinguistique : dix ans de linguistique appliquée à l’Université de Neuchâtel », dans Tranel, Neuchâtel, no 15, décembre 1989, 79-84 (reprise d’un article de Techniques d’instruction, 1977, 4, 6-11).

2. « Les collèges des pays réunis à la France dans l’Université impériale », dans Cinq siècles de relations franco-suisses, Neuchâtel, La Baconnière, 1984, 167-182.

3. « Statut des langues, minorisation et interaction au tournant du XIXe siècle », dans Minorisation linguistique et interaction, Genève, Droz, 1989, 207-215.

4. Le parcours d’un précepteur à la fin du XVIIIe siècle : « Un précepteur en Allemagne à la veille de la Révolution, d’après sa correspondance, dans Documents SIHFLES, no 11, juin 1993, 37-44 ; « Les métamorphoses d’un maître de français à Londres à la fin du XVIIIe siècle », dans Regards sur l’histoire de l’enseignement des langues étrangères, Tübingen, Gunter Narr, et Paris, SIHFLES, 1995, 17-24.

5. « Vers un alphabet phonétique international : « universalité » du français et pratiques « phonographiques » au sein de l’Association Internationale des Travailleurs, 1865-1868″, dans Phonétique et pratiques de prononciation, Paris, SIHFLES, 130-143.